Publié le 18/01/2021

Coutanceau, l’esprit marin

À La Rochelle, ville côtière du sud-ouest de la France, le nom Coutanceau est connu de tous. Né et élevé dans cette magnifique cité, le chef Christopher Coutanceau considère la mer comme son terrain de jeu depuis l’enfance. Il y a ouvert récemment un hôtel de 11 chambres, La Villa Grand Voile.

Coutanceau, l’esprit marin

À La Rochelle, ville côtière du sud-ouest de la France, le nom Coutanceau est connu de tous. Né et élevé dans cette magnifique cité, le chef Christopher Coutanceau considère la mer comme son terrain de jeu depuis l’enfance. Il y a ouvert récemment un hôtel de 11 chambres, La Villa Grand Voile.

« Je viens ici depuis l’âge de trois ans », m’explique le chef Christopher Coutanceau lorsque nous arrivons à la criée. Son grand-père, un pêcheur, l’y emmenait au petit matin avant l’école pour approvisionner le restaurant de ses parents. « Ces gens sont poissonniers depuis sept générations ! » Il fait le tour de la criée en étudiant la pêche du matin : homards, maquereaux, calamars, crevettes, palourdes… « Comme la saison de la langoustine touche à sa fin, nous allons modifier la carte la semaine prochaine », explique le chef. Nous chargeons le camion qui livre ses deux établissements – Coutanceau, son restaurant gastronomique couronné de 3 étoiles Michelin, et son bistrot La Yole de Chris –, puis nous nous mettons en route.
 

Maquereaux, calamars, palourdes... la pêche du matin à la criée de La Rochelle.
Christopher Coutanceau venait déjà enfant à la criée avec son grand-père, pêcheur. 


Son grand-père l’emmenait pêcher après l’école et ils rapportaient leur prise du jour à sa grand-mère pour qu’elle la cuisine. Ses parents, Richard et Maryse Coutanceau, tenaient un restaurant gastronomique sur la plage de la Concurrence, où le jeune Christopher venait donner un coup de main pendant la haute saison. Malgré tout, il ne se voyait pas reprendre l’affaire familiale. En fait, il voulait devenir footballeur, mais sa passion pour la cuisine a fini par l’emporter : il est entré en école hôtelière, puis a fait des stages chez elBulli en Catalogne, au Grand Véfour et au Laurent à Paris.

Après sa formation, il est revenu à La Rochelle, où il a ouvert un premier restaurant. Des années plus tard, en 2001, il a commencé à travailler aux côtés de son père dans le restaurant familial. Quand ce dernier a pris sa retraite en 2007, Christopher Coutanceau et son sommelier Nicolas Brossard ont racheté l’établissement. Ils gèrent désormais ensemble le restaurant gastronomique Coutanceau, le bistrot La Yole de Chris et l’hôtel Villa Grand Voile qui vient d’ouvrir ses portes. 
 

L'hôtel Villa Grand Voile complète l'expérience Coutanceau à La Rochelle depuis l'été 2020.
L'ancienne demeure a été rénovée pour laisser place à un décor réconfortant, évoquant le paysage marin. 


La Villa Grand Voile est installée dans une ancienne demeure d’armateur datant de 1715. Outre les espaces dédiés à la restauration, elle possède 11 chambres et suites sur mesure, chacune décorée avec élégance de façon à évoquer le paysage marin. Je suis arrivée en début d’après-midi pour profiter du confort des lieux. La piscine chauffée dans la cour donnait envie d’un petit plongeon.
 


Comme c’était mon premier séjour à La Rochelle, je suis partie découvrir l’emblématique Vieux-Port sous le doux soleil de ce mois d'octobre. La brise marine semblait particulièrement vivifiante à la Parisienne que je suis. Je me suis promenée le long du port jusqu’à la plage de la Concurrence, où le bistrot La Yole de Chris propose les mêmes ingrédients de qualité que le restaurant gastronomique, mais dans une ambiance plus décontractée.

Balade dans les rues de la vieille ville de La Rochelle
L'emblématique Vieux-Port de La Rochelle


L’intérieur au décor d’inspiration marine présente de longues tables communes en bois et un grand patio donnant sur la mer. Je me suis confortablement installée pour déguster un bol de palourdes au beurre et à l’aneth, suivi d’un steak de thon rouge cuit au feu de bois.
 

La Yole de Chris est le bistrot marin attenant au restaurant gastronomique, sur la plage de la Concurrence. En 2020, le guide Michelin lui a décerné une assiette Michelin, ainsi que le macaron vert mettant en valeur un "Engagement pour une gastronomie durable".
Les produits de la mer, toujours à l'honneur dans les restaurants du chef Coutanceau.


Animé par la passion de la mer que son grand-père lui a transmise, Christopher Coutanceau se considère autant pêcheur que chef. Sa cuisine impose le respect, tout comme son engagement pour le développement durable de la vie marine. Il se souvient combien elle était abondante quand il allait pêcher avec son grand-père, mais la surpêche est en train de détruire les ressources marines. Défenseur de la pêche saisonnière, il mène le combat avec des associations telles que Ré Nature Environnement et Bloom pour mettre un terme aux pratiques nocives telles que la pêche électrique. « Dès qu’on commence à employer ces techniques destructrices, on vide la mer. » Sa cuisine adopte donc une approche zéro déchet axée sur l’utilisation du poisson entier, de la tête à la queue.
 

Christopher Coutanceau qui se définit comme "cuisinier-pêcheur" est un fervent défenseur de la biodiversité marine et de pratiques de pêche respectueuses. 


La salle du restaurant Coutanceau offre une vue panoramique sur l’océan. Entièrement refaite en 2017 par l’architecte local Bertrand Pourrier, elle évoque son environnement à travers une moquette bleu océan ainsi que des vagues au plafond et sur les murs. Tout a été conçu sur mesure jusque dans les moindres détails, par exemple l’éclairage qui se règle automatiquement en fonction de la lumière extérieure tout au long de la journée, ou encore les chaises pensées pour le confort des clients du début à la fin de leur repas.
 

La salle du restaurant Coutanceau offre une vue panoramique sur l'océan. 
Le chef et son associé, le sommelier Nicolas Brossard, ont fait appel à l'architecte local Bertrand Pourrier pour la décoration du restaurant gastronomique. 


J’ai été chaleureusement reçue par Nicolas Brossard, qui m’a fait visiter la cave du restaurant avec ses 20 000 bouteilles ! Nous nous sommes frayé un chemin en cuisine, et quand l’équipe a terminé ses dernières préparations, nous nous sommes retrouvés à la prestigieuse Table du Chef. C’est là que j’ai pu me délecter d’un menu dégustation de six plats parfaitement orchestré...
 

Le hors-d’œuvre est composé de trois bouchées : tartelette de crevette marinée au citron vert et cervelle croustillante, calamar à la crème avec oignons doux brûlés et noisettes rôties, salade d’algue au lieu jaune. Cette explosion de saveurs océanes prépare les papilles pour la suite du menu.

Un amuse-bouche d’inspiration automnale à base de daurade caramélisée et de courge butternut en bisque de homard au gingembre.
Parmi les pains faits maison, une brioche aux algues servie avec un beurre d’algue.
Première entrée du menu dégustation : une gelée de carapace de crabe avec écume aux légumes surmontée de caviar Kristal de Kaviari. Ce plat est une évocation de l’enfance du chef, quand il allait pêcher le crabe en famille sur l’île de Ré voisine pendant les vacances d’été.

Après cette phénoménale entrée en matière, la dégustation s’est poursuivie avec un tartare de langoustine crue et une gelée de pinces servis avec une chip à base de queues de langoustine.

C’était ensuite le tour des plats principaux : le thon rouge de l’Atlantique cuit au feu de bois était servi avec des tomates au piment de piquillo, un jus de canard à l’estragon et du vinaigre de Bouteville. La tomate était aussi déclinée en verrine dans un trio d’interprétations : gelée, sorbet légèrement épicé et eau de végétation.

L’anguille braisée et le jaune d’œuf de poule fumé mariné dans une distillation d’hélichryse, une plante qui pousse sur l’île de Ré, ont été accompagnés de betterave acidulée dans le jus de cuisson de l’anguille légèrement émulsionné avec des herbes fraîches et des copeaux de betterave crue.

En guise de desserts :
Estran, estragon avec citron confit et émulsion d’algue au citron. L’estran est une partie de littoral découverte à marée basse où l’on vient ramasser des fruits de mer, des crustacées et des algues.
Dômes de jonchée charentaise au lait d’amande douce. La jonchée est un fromage frais à base de lait de vache affiné dans une enveloppe tissée en joncs naturels qui lui confère un goût herbacé légèrement amer.


Tout au long de ce menu dégustation, Christopher Coutanceau déclare son amour à la mer. Chaque plat est dressé avec élégance de manière à mettre en valeur la qualité des ingrédients. Le chef réussit à nous éduquer sur la saisonnalité et le développement durable de la vie marine. Je quitte son restaurant inspirée par cette expérience culinaire extraordinaire, mais aussi par cet engagement pour la protection des ressources naturelles.

 

Articles connexes dans notre magazine
Stéphane Buron,|un chef en quête de nature
Stéphane Buron,
un chef en quête de nature
Cliquez ici pour lire
Les temps durables de Glenn Viel
Les temps durables
de Glenn Viel
Cliquez ici pour lire